jeudi 5 décembre 2013

Communiqué LDH: Le racisme et la haine ne doivent pas faire débat



La Ligue des droits de l’Homme condamne vigoureusement les scandaleux propos tenus le 12 novembre 2013 à l’encontre des Roms, à Roquebrune-sur-Argens par son maire, Luc Jousse. Celui-ci y exprimait son regret que les secours intervenus dans un camp, à l’occasion d’un incendie, aient été appelés trop tôt.

La Ligue des droits de l’Homme déplore que se poursuive cette libération de propos racistes et stigmatisants, en particulier émanant d’élus. Cette attitude, liée évidemment aux prochaines échéances électorales, ne fait que placer ceux qui tiennent ces propos dans une course aux extrêmes qui est insupportable.

La Ligue des droits de l’Homme a déposé une plainte auprès de la procureure de la République du tribunal de grande instance de Draguignan, pour provocation à la haine ou à la violence et à la discrimination raciale.

La Ligue des droits de l’Homme rappelle que la haine ne doit en aucun cas faire débat.

Paris, le 5 décembre 2013

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 Lettre RAR adressée à Madame la Procureure du TGI de Draguignan
Paris le 5 décembre 2013

Madame la Procureure de la République,
La Ligue des droits de l’Homme vous saisit d’une plainte à l’encontre de monsieur Luc Jousse, maire de Roquebrune-sur-Argens, suite aux propos tenus lors du conseil de quartier des Issambres qui s’est tenu le 12 novembre 2013 dans la salle Robert Manuel, aux Issambres.
Le 28 novembre 2013, un collectif de citoyens de Roquebrune, « L’équipe des Indignés de Roquebrune », nous a transmis, par courriel, un extrait audio de cette réunion durant laquelle monsieur Luc Jousse a tenu les propos suivants :
« ... Qui dit lutte contre les incendies, dit débroussaillement. Vous avez été merveilleux pendant 10 ans sur le débroussaillement, ça a très bien fonctionné. On est cité en exemple de partout. C’est peut-être pour ça que malgré tous les petits départs de feux, il n’y a pas eu de nouveau d’incendies majeurs à Roquebrune depuis 11 ans peut-être, peut-être. Je vous rappelle quand même que les gens du voyage, que dis-je, les Roms m’ont mis 9 fois le feu. 9 fois des départs de feux éteints par le SDIS dont le dernier, ils se le sont mis eux-mêmes, vous savez ce qu’ils font : ils piquent des câbles électriques et après ils le brûlent pour récupérer le cuivre et ils se sont mis à eux-mêmes le feu dans leurs propres caravanes ! Un gag ! Ce qui est presque dommage c’est qu’on ait appelé trop tôt les secours !... Mais je ne l’ai pas dit, je ne l’ai pas dit. Non mais parce-que les Roms c’est un cauchemar, c’est un cauchemar. Imaginez qu’aujourd’hui, depuis quelques jours, j’ai attaqué la sous-préfecture au tribunal en leur demandant de bien vouloir respecter la décision de justice. Nous avons une décision d’expulsion des Roms, nous l’avons, j’ai gagné au tribunal ! Eh bien le sous-préfet, il fait rien. ».
Ces propos sont constitutifs du délit de provocation à la haine ou à la violence et à la discrimination raciale à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, réprimés par l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881.
Nous vous remercions de bien vouloir nous tenir informés de la suite que vous voudrez bien accorder à la présente plainte.
Dans l’attente, nous vous prions de croire, Madame la Procureure de la République, à l’assurance de notre respectueuse considération.

Pierre Tartakowsky
Président de la Ligue des droits de l’Homme
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[Var-Matin, mercredi 4 décembre 2013 à 18h48]

Luc Jousse, maire UMP de Roquebrune-sur-Argens, a exprimé de violents propos à l’encontre de la communauté Rom lors d’une réunion publique organisée aux Issambres le 12 novembre dernier.
A l’origine de l’affaire, révélée par nos confrères de Médiapart, un conseil de quartier au cours duquel le maire de cette commune du Var de 13.000 habitants, évoque le Camp de Roms installé sur son territoire depuis l’été dernier.
"Ce qui est presque dommage, c’est qu’on ait appelé trop tôt les secours"
"Vous savez ce qu’ils font : ils piquent des câbles électriques et après ils le brûlent pour récupérer le cuivre et ils se sont mis à eux-mêmes le feu dans leurs propres caravanes ! Un gag ! Ce qui est presque dommage, c’est qu’on ait appelé trop tôt les secours", ironise l’élu, provoquant les rires gênés de l’assistance que l’on entend distinctement sur une bande enregistrée ce jour-là par une personne assistant à la réunion et que nous nous sommes procurée.
"Que peut-on me reprocher ?"
Contacté par nos soins, Luc Jousse affirme "ne plus se souvenir d’avoir dit cette phrase. Mais que peut-on me reprocher, dès lors que c’est moi qui ait prévenu à neuf reprises les services du SDIS d’un départ de feu dans le camp ? Qui plus est, le jugement d’expulsion des derniers Roms restant sur la commune nous a été délivré il y a maintenant deux mois. Et la sous-préfecture ne l’a toujours pas fait exécuter. Moi, c’est ça qui me met en rogne !"
L’UMP va statuer sur son cas le 11 décembre
Il n’est pas sur que les instances de l’UMP se contentent de tels arguments. Le conseil national du parti a annoncé son intention de statuer sur le cas de Luc Jousse le 11 décembre prochain, et le président de la fédération UMP du Var, Georges Ginesta, député-maire de Saint-Raphaël, évoque des "propos pour le moins regrettables et condamnables sur le plan moral".
La sanction pourrait-elle aller jusqu’au retrait de l’investiture du parti qui était accordé à Luc Jousse, désireux de solliciter un nouveau mandat en mars prochain ?